Aider nos enfants à avoir un esprit critique
« Penser, c’est dire non » disait Alain. La véritable pensée exige de remettre en cause les idées reçues, les certitudes. Elle requiert de faire un mouvement à l’intérieur de soi et de s’interroger sur la pertinence d’une idée avant de la faire sienne. Ce travail de réflexion permet de développer un esprit critique afin d’avoir une pensée libre et autonome.
Cette pensée autonome leur permettra d’œuvrer pour un monde meilleur
En ce sens, il est essentiel d’apprendre à nos enfants à ne pas se conformer aux idées communément admises, à oser s’opposer, « dire non » pour développer une pensée propre. C’est le fondement même d’un esprit libre, un esprit assez solide et sûr de ses propres idées et de son libre arbitre intellectuel pour oser se confronter aux idées d’autrui et s’en enrichir. Plus on est sûr de son esprit analytique et de son esprit critique et plus on peut se permettre de s’imprégner des idées de l’Autre pour grandir, apprendre et évoluer. Il apparaît qu’accompagner nos enfants dans le développement d’une pensée autonome est la base de tout apprentissage et de tout métissage. Or c’est la somme de toutes nos évolutions individuelles qui permet au monde de changer. C’est en remettant sans cesse les idées en cause, en leur permettant d’être vivantes, en mouvement que l’on permet au monde d’évoluer. En ce sens, apprendre à nos enfants à développer un esprit critique les forme à devenir des êtres humains et des citoyens accomplis.
Mais pas de liberté de pensée véritable sans avoir assimilé les contraintes
En revanche, s’il est essentiel d’encourager nos enfants vers cette autonomie de pensée, vers cette liberté, il serait dangereux d’oublier qu’elle s’exprime toujours dans un cadre, dans un espace contraint. Ainsi, plus on laisse de liberté à son enfant, plus il conviendrait, en parallèle, de le rendre conscient des contraintes inhérentes au monde, de les lui faire palper et percevoir au risque d’en faire un marginal. Apprendre à son enfant à s’opposer aux idées communément reçues pour défendre ses valeurs et ses idéaux et œuvrer pour un monde meilleur me semble essentiel. Mais s’opposer si sa voix ne porte pas ne sert à rien. Pour qu’une opinion soit écoutée, pour qu’elle ait de l’écho, il faut qu’elle soit légitime et, pour être légitime, il faut avoir fait ses preuves, avoir compris les rouages du système que l’on prétend dénoncer, l’appréhender avec ses forces et ses faiblesses, en avoir fait l’expérience. A l’image des policiers qui infiltrent les gangs pour mieux comprendre leur fonctionnement et faire tomber le système de l’intérieur, c’est quand on a réussi à être reconnu par ses pairs que l’on acquiert la légitimité suffisante pour critiquer le système et le faire évoluer.
S’imposer, réussir pour que sa voix légitimée puisse porter et transformer le monde
Attention donc à tous nos apprentis révolutionnaires qui n’ont pas fait leurs preuves. Leurs meilleures armes sont la connaissance du système qu’ils entendent réformer et une volonté d’acier, une force de travail pour imposer leur vision du monde. Leur révolte face à notre société, à un capitalisme forcené qui est source d’inégalités insupportables, qui ne respecte pas la nature qui nous entoure et qui place l’homme sous le Dieu argent est  compréhensible. Mais cette révolte légitime ne prendra tout son poids et ne pourra être entendue que le jour où ils auront prouvé qu’ils ont réussi à infiltrer le système et ont acquis assez de pouvoir pour le faire plier selon leur idéaux. Etrangement, ils devront réussir et être reconnus dans le système qu’ils critiquent pour avoir une influence sur son évolution. Leur idéal deviendra réalité le jour où ils auront réconcilié idéalisme et réalisme, c’est-à -dire le jour où ils auront le pouvoir et la puissance de frappe nécessaires pour influer sur leur temps.